ITB Institut Technique de la betterave

 Accueil / Tous les articles / Article

Les IFTs betterave sous la loupe

Focus sur l’évolution de 2011 à 2021 de cet indicateur d’utilisation des produits phytosanitaires dans les parcelles betteravières avec le détail par poste herbicide, fongicide et insecticide.

Un constat général : les IFT en augmentation pour la betterave

L’IFT (indicateur de fréquence de traitements) en culture de betterave sucrière est bien en augmentation sur les 10 années qui séparent les enquêtes analysées, passant de 4,2 en 2011 à 6,7 en 2021 (IFT hors traitement de semences). Si on regarde en détail par type d’intervention, on observe une augmentation à la fois pour les herbicides, les fongicides et les insecticides. Quelles sont les raisons de cette évolution ? 

Les herbicides restent un enjeu majeur pour la betterave ! 

Les herbicides sont les plus gros contributeurs des IFT pour la culture, et représentent la moitié de l'IFT total. On observe que l’augmentation concerne majoritairement la dernière année d’analyse et ce quelle que soit la région. 

⇒ Plus d'interventions herbicides ? 

Non, avec 4,6 passages en 2021, contre 4,9 passages en 2017 et 5 passages en 2011, la tendance est même plutôt à la baisse, à l’exception de la région Normandie, où des problématiques de résistance des graminées sont remontées.

⇒ Plus de produits mélangés par passages ? 

Ici encore, la clé de l’augmentation ne se situe pas à ce niveau : les nombres de traitements, tels que calculés par le ministère de l’Agriculture (un traitement correspondant à 1 date x 1 produit herbicide) ne sont pas en augmentation en 2021.

⇒ Des produits différents ou des doses plus élevées ? 

Une part de l'explication réside dans les évolutions des gammes de produits, de 2011 à 2021 : les nouvelles homologations modifient l'offre en produits, certains disparaissent. Ainsi, le retrait du desmédiphame a conduit à une utilisation des matières actives phenmédiphame et éthofumésate plus souvent en produits "solo", ce switch contribuant, par un simple effet de calcul, à l’augmentation des IFTs herbicides. De nouvelles homologations ou ré-homologations à des doses maximales (références des calculs d'IFT) plus basses ont également favorisé cette augmentation sans réelles modifications des pratiques.

La pression en cercosporiose, à l’origine de l’augmentation des IFT fongicides

Deuxième poste le plus contributeur de l'IFT total, le nombre d’applications fongicides annuelles. Il a sensiblement augmenté dès 2017, et ce, dans toutes les zones de production betteravière, passant d’une moyenne de 1,3 en 2011 à 1,7 en 2017 puis 1,8 en 2021.

Cette évolution doit être rapprochée du constat général, confirmé par l’analyse des observations du réseau d’épidémiosurveillance : la pression en cercosporiose est en augmentation et se généralise à l’ensemble des zones de production. 
 

Au niveau national, ce sont 80 % des premières interventions fongicides qui sont désormais déclenchées par la cercosporiose, contre 40 % avant 2017 :

  • Les régions où l’oïdium et la rouille étaient les maladies les plus impactantes sont dorénavant touchées par la cercosporiose : en Normandie, dans l’Oise, la Somme ou le Nord - Pas-de-Calais, les premiers symptômes de maladie étaient signalés historiquement début aout, ils sont désormais observés dès la deuxième quinzaine de juillet, déclenchant les premières interventions.
  • La cercosporiose apparaît aussi plus précocement dans les régions à risque historique, ce qui allonge la durée de la protection fongicide. Ce sont ces régions qui présentent les IFT fongicides les plus élevés.
  • En moyenne, sur l'ensemble des zones de production, les premiers symptômes sont à présent observés une dizaine de jours plus tôt comparativement aux années 2009-2013.

Légende : Les boîtes permettent d’afficher la médiane, sous forme d’un trait, qui sépare les données en deux (50 % au-dessus et 50 % en dessous), ainsi que la moyenne, sous forme d’un point à l’intérieur de la boite. Les limites hautes et basses des boîtes encadrent respectivement les 25 % au-dessus et 25 % des surfaces de part et d’autre de la médiane. Les points au-dessus et en dessous des boites correspondent à des dates considérées comme extrêmes par rapport au jeu de données.

Par ailleurs, la cercosporiose s’avère difficile à maîtriser, et nécessite plusieurs renouvellements de la protection : l'élément cuivre via le produit Airone SC (dérogation 120 jours) est une solution complémentaire dans la gestion de la maladie : la filière a bénéficié en 2017 et en 2021 d’une dérogation pour ce produit. Conseillé dans des conditions favorables à la cercosporiose, en association avec un produit à base de triazole, il explique aussi en partie l’augmentation des IFTs fongicides.

L’augmentation des IFTs insecticides liée aux applications aphicides

L’IFT insecticide, hors traitement de semences, avec une valeur de 0,4 en 2021, reste le plus faible contributeur des IFTs. Malgré tout, il est aussi en augmentation en 2021, alors qu’il était stabilisé jusqu’en 2017 à 0,2.

⇒ Comment expliquer cette évolution récente ? 

Les insecticides sont destinés à lutter contre deux types de ravageurs différents : ceux qui entrainent des dégâts sur les plantules (altises), le bouquet foliaire (pégomyies, noctuelles défoliatrices), ou sont des portes d’entrées à des champignons (teignes), et ceux qui sont surtout des vecteurs de virus, principalement les pucerons verts vecteurs de jaunisses.

  • Pour les premiers, leurs pressions respectives sont très variables d’une année à l’autre, les besoins d'interventions le sont autant : ainsi en 2017, 14 % des surfaces avaient reçu un traitement insecticide (hors aphicide), en majorité pour lutter contre les teignes et les noctuelles défoliatrices, contre 3,5 % des surfaces en 2021, année de faible pression de ces ravageurs.
  • L’évolution la plus conséquente concerne la protection contre les pucerons vecteurs de la jaunisse. Les traitements de semences néonicotinoïdes étaient utilisés sur 98 % des surfaces avant le retrait de leur usage en 2018. Même si des dérogations ont été accordées pour maintenir une protection de semences néonicotinoïde en 2021 et 2022, la lutte s’était déjà reportée partiellement dès 2021 sur des interventions aphicides en végétation. La dose de néonicotinoïdes autorisée par dérogation en traitement de semences étant inférieure à la dose AMM, des traitements aphicides en relais en végétation avaient été nécessaires. En 2021, 26 % des surfaces avaient reçu au moins une intervention aphicide, contre 6,5 % des surfaces en 2017.  

En conclusion, les évolutions des IFTs en betterave ont plusieurs explications, selon le type de traitement considéré : une évolution de la gamme des produits herbicides, ou des réhomologations, qui peuvent fausser l’analyse et laisser penser à une utilisation plus intensive des phytosanitaires, une intensification de la lutte fongicide liée à l’augmentation de la pression cercosporiose, et une évolution des modes de lutte dans la protection contre les pucerons. L’IFT reste un indicateur des pratiques qui doit être interprété avec précaution.

L’IFT (Indicateur de Fréquence de Traitement) est un indicateur retenu dans le cadre du plan Ecophyto pour suivre l’évolution des intrants phytosanitaires en agriculture.

L’intérêt de cet indicateur réside dans le fait qu’il est calculable pour l’ensemble des filières, par culture, par traitement, par type de traitement (herbicide, fongicide, …) et par produit, ce qui permet de caractériser finement les pratiques pour chaque culture. Il peut être calculé rétrospectivement à partir du moment où on dispose des informations nécessaires, en l’occurrence ici les données des enquêtes PK GC du ministère de l’agriculture de 2011, 2017, et 2021. En culture de betterave, il permet de prendre en compte le fait que pour les passages herbicides, les doses des produits sont fractionnées en plusieurs passages. 

L’IFT se calcule à partir de la dose appliquée du produit divisée par la dose homologuée du produit multipliée par le pourcentage de surface d’application. Les IFTs des différentes catégories de traitements peuvent être additionnés pour rendre compte de l’usage global de produits phytosanitaires.


Cet article se focalise sur 3 jeux de données issus des "enquêtes pratiques culturales grandes cultures" menées par le ministère de l'Agriculture : 559 parcelles betteravières en 2021, 682 parcelles betteravières en 2017 et 854 parcelles en 2011. 

Les questionnaires ainsi que les principaux résultats sont disponibles sur le site agreste / sources, définitions, méthodes / Sources / S-PK GC 2021. L'accès à certaines données utilisées dans le cadre de ce travail a été réalisé au sein d'environnements sécurisés du Centre d'Accès Sécurisé aux données - CASD (Réf. 10.34724/CASD). 

*Source : Ministère de l'Agriculture SSP [Producteur], Pratiques culturales sur les grandes cultures - 2011 / 2017 / 2021 [Fichiers de données], Centre d'Accès Sécurisé aux Données (CASD) [Diffuseur], Traitement ITB. 

Remonter en haut de la page

Agrément conseil de l’ITB à l’utilisation des produits phytosanitaires n° 7500002.
Le portail EcophytoPIC recense les techniques alternatives à l’utilisation des produits phytopharmaceutiques.


Organisme agréé Crédit d'impôt Recherche


L'Institut Technique de la Betterave est
membre du réseau Acta

Institut Technique Agricole Qualifié
par le Ministère de l’Agriculture et de l’Alimentation