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PNRI - Prévoir les vols de pucerons virulifères grâce à l'épidemiosurveillance

ITB National ·

L'une des actions du projet SEPIM vise à anticiper les vols de pucerons virulifères par des données originales d’épidémiosurveillance obtenues grâce à des dispositifs et des stratégies très spécifiques.

Article rédigé par Yann Tricault et Martin Luquet, avec la collaboration de Sylvain Poggi, Christelle Buchard et Manuel Plantegenest (IGEPP, INRAE, Institut Agro, Univ Rennes, France)

 

De l’enregistrement des vols à leur prévision

 

Les virus des jaunisses de la betterave sucrière sont transmis par des pucerons tels que Myzus persicae, dont les formes ailées colonisent les parcelles au printemps. Si les vols de pucerons présentent une saisonnalité marquée, l’examen des données historiques fournies par les pièges à succion du réseau Agraphid (voir ci-après) montre que la précocité et l’amplitude de ces vols varient fortement entre bassins de production betteravière et d’une année à l’autre. Anticiper les caractéristiques locales du vol de printemps permettrait d’améliorer la prévision et la gestion du risque jaunisse à une échelle opérationnelle.

 

Il existe déjà des modèles permettant de prévoir les vols de pucerons et le risque jaunisse associé grâce à des variables environnementales connues pour leur importance dans le cycle de vie des pucerons, telles que la température hivernale. Mais il reste une part importante d’incertitude dans les prédictions de ces modèles. Une façon d’améliorer ces prédictions pourrait être d’utiliser des données de suivi en temps réel des vols de puceron.

 

Focus sur les tours à succion

 

La tour à succion (fig. 1) est un dispositif aspirant l’air à une hauteur de 12m avec un débit constant et continu. Les pucerons ailés capturés quotidiennement sont identifiés et dénombrés par un technicien qualifié. Les données recueillies permettent ainsi de suivre la dynamique de vol d’une espèce d’intérêt en temps réel (en pratique, selon un pas de temps journalier). Des travaux antérieurs ont montré que ce dispositif rend correctement compte des vols de pucerons à l’échelle du département où le piège est installé.

 

Depuis 1978, une vingtaine de tours à succion ont été actives mais sur des périodes variant selon leur localisation. Ce réseau baptisé Agraphid1  couvrait le territoire métropolitain, la Belgique et la Suisse (fig. 2). De 1978 à 2014, selon les périodes, jusqu'à 16 tours ont simultanément capturé des pucerons ailés à l'année. Ces données historiques sont mobilisées au sein du projet SEPIM dans l’objectif d’améliorer la prévision des vols des pucerons vecteurs des jaunisses. 

 

Entrée en fonction dès 1978, la tour à succion de Le Rheu (35), gérée par l’UMR IGEPP, est depuis 2015 l’unique piège actif à l’année (deux tours, proches respectivement de Reims et d’Auxerre fonctionnent encore à l’automne). L’abondance des pucerons Myzus persicae ailés (entre autres espèces) interceptés y est mesurée quotidiennement.

 

Stratégie de la vigie

 

En l’absence de piège à succion fonctionnel au printemps en zone de production betteravière, nous cherchons actuellement à prévoir les caractéristiques des vols de l’année en tout point de cette zone à partir des observations réalisées à Le Rheu. En effet, la douceur du climat océanique permet généralement aux pucerons de s’envoler plus tôt en Bretagne que dans le grand quart nord-est de la France. L’analyse des données historiques issues du réseau Agraphid met en évidence une corrélation nette entre les captures réalisées à Le Rheu et celles effectuées par les autres tours à succion. De façon intéressante, nous observons que les données à Le Rheu semblent apporter davantage d’information sur la date de début de vol de printemps de Myzus persicae que les données climatiques locales autour des pièges situés dans les zones de culture de betterave.

 

En combinant les informations acquises par le piège de Le Rheu, utilisé comme vigie, aux informations environnementales locales mais également à des approches de connectivité entre zones géographiques par mouvements de masses d’air (qui peuvent transporter les pucerons), nous cherchons actuellement à déployer une approche fine de prévision des dynamiques de vol au-dessus des parcelles de betteraves. Les données historiques du réseau Agraphid seront utilisées pour calibrer ce nouveau modèle.

 

L’amélioration des prévisions de la précocité et de l’amplitude des vols de pucerons au-dessus des parcelles de betteraves, et des incertitudes associées, ouvre des perspectives supplémentaires de gestion et de prévision du risque jaunisse. Anticiper ces vols permettrait en effet de mieux raisonner les techniques visant à limiter l’infestation (par exemple les futures méthodes identifiées dans le cadre du PNRI). 

 

Une prochaine étape consistera à coupler ces prévisions de vols à un modèle de dynamique locale des populations de pucerons et de l’épidémie de jaunisse qu’elle engendre, en mobilisant notamment les données de comptage de pucerons et d’observations de la maladie collectées au champ par les dispositifs VIGIBET et BSV. L’ambition de ce volet du projet SEPIM est de proposer un modèle de prévision du risque jaunisse en fonction du lieu de production.

 

Figure 1 A: Le piège à succion de Le Rheu (Ille-et-Vilaine) géré par l’UMR IGEPP. B: Intérieur du piège. La zone entourée en rouge correspond aux pots en plastique contenant les captures quotidiennes, fixés sur un tourniquet. Toutes les 24 heures le tourniquet tourne, le pot du jour prend alors sa place et conditionne les pucerons aspirés. Photos : © INRAE IGEPP/ Christelle Buchard.

 

 

Figure 2: Le réseau historique de pièges à succion Agraphid (géré par l’UMR IGEPP). Chaque marqueur correspond à la position géographique d’un piège. Le seul piège encore en fonctionnement à l’année, situé à Le Rheu (Ille-et-Vilaine) est indiqué en rouge.

 

1 Hullé, M. (1991). Agraphid, un réseau de surveillance des populations de pucerons : base de données associée et domaine d'application. In Journées sur les bases de données européennes en protection des cultures.

 

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