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Des bandes fleuries pour lutter contre les pucerons virulifères : les premiers résultats

ITB National ·

Evaluer l’effet du déploiement d’infrastructures agroécologiques (IAE) comme les bandes fleuries sur le contrôle des pucerons vecteurs de jaunisse est au cœur du projet de recherche IAE-Betterave du PNRI. A l’approche de la fin de la campagne 2022, c’est l’occasion de faire le point sur les essais menés dans le cadre du réseau Fermes Pilotes et de dévoiler quelques résultats préliminaires encourageants pour la suite du projet.

 

Cet article a été rédigé par Kévin Tougeron, chercheur postdoctoral à l'UMR 7058 EDYSAN, du CNRS et de l'Université de Picardie Jules Verne

 

But des essais bande fleurie

 

Comme déjà évoqué dans un précédent article (Des infrastructures agroécologiques (IAE) au service de la protection des betteraves), la littérature scientifique nous indique que l’implantation d’IAE telles que des bandes fleuries enrichit le paysage agricole en prédateurs ou parasitoïdes, susceptibles de réguler les populations de pucerons. En 2022, dès la levée des betteraves en avril, des suivis ont été effectués dans 22 parcelles du réseau Fermes Pilotes, sur l’ensemble du bassin de production de la betterave sucrière, du nord de la France au Loiret.

 

Premiers résultats

 

Les résultats présentés ici, bien que préliminaires, mettent en évidence un effet bénéfique des bandes fleuries sur le contrôle des pucerons noirs comme des pucerons verts (Figure 1A et 1B). On observe dans un premier temps des différences marquées d’abondances de pucerons selon les types d’IAE qui bordent les parcelles ; 1) les haies semblent favorables aux pucerons à proximité de celles-ci (c’est un élément déjà connu dans la littérature), 2) les abondances de pucerons sont plus faibles à proximité des bandes fleuries et 3) l’effet bénéfique des bandes fleuries ne s’estompe que légèrement entre 5 et 50m.

 

En ce qui concerne les ennemis naturels retrouvés sur le feuillage, ils semblent autant abondants quelle que soit l’IAE ciblée en bordure de champ, mais leurs abondances décroissent rapidement quand on s’éloigne de la bande fleurie (Figure 1C), ce qui peut probablement s’expliquer par un fort effet de ‘rétention’ de cette dernière ; les ennemis naturels de type coccinelles, syrphes ou chrysopes tirent avantage des ressources florales pour leur développement et la croissance de leurs populations. Attention cependant : cela ne signifie pas forcément que les ennemis naturels ne vont jamais se nourrir des pucerons dans la parcelle (ils sont bien présents à 5 et 25m), mais qu’on ne les observe pas beaucoup à 50m de la bande fleurie. 

 

 

Figure 1 : Abondance de pucerons noirs (A), de pucerons verts (B) ou d’ennemis naturels sur feuillage, principalement coccinelles dans les conditions de 2022 (C); Moyenne par plante (±intervalles de confiance réduits à 60% pour la lisibilité de l’article), en fonction de la distance (en m) à la bordure et du type d’IAE rencontré. Les données sont combinées pour l’ensemble des parcelles et des dates de suivi. Attention, les résultats présentés sont issus d’un jeu de données partiel pour le moment (N = 9 parcelles) ; à considérer avec prudence, donc.

 

 

Pour mieux comprendre les effets observés sur les populations de pucerons, il est utile de s’intéresser non seulement aux ennemis naturels sur feuillage, mais aussi aux ennemis naturels dits ‘épigés’, c’est-à-dire évoluant à même le sol, tels que les carabes ou les araignées (Figure 2A et 2B). Les populations de carabes sont favorisées par la présence de bandes fleuries et de bandes enherbées et dans une moindre mesure par les haies. La distance à la bordure n’a que peu d’effet sur ces organismes relativement mobiles. En revanche, les populations d’araignées sont plus abondantes du côté des haies et des bandes enherbées qu'à côté des bandes fleuries. Les araignées chasseuses (au sol) semblent avoir une préférence pour les bordures de champ et ne pas se retrouver en grand nombre au milieu des parcelles. Attention toutefois, car ces comptages ne tiennent pas compte d’un potentiel rôle positif des bandes fleuries sur les araignées tisseuses, très utiles pour capturer des pucerons ailés dès leur arrivée dans les parcelles de betteraves !

 

Figure 2 : Abondance moyenne par piège barber de carabes (A) et d’araignées (B) en fonction de la distance à différentes IAE (m). Les données sont combinées pour l’ensemble des parcelles et des dates de suivi. Attention, les résultats présentés sont issus d’un jeu de données partiel pour le moment (N = 9 parcelles) ; à considérer avec prudence, donc.

 

L’importance de la qualité des bandes fleuries

 

Grâce aux relevés floristiques effectués sur l’ensemble des bandes fleuries, nous sommes en mesure de déterminer la qualité de l’IAE pour chaque parcelle et à chaque date de suivi. Sans s’étendre sur ce point qui doit encore être affiné, de premières analyses montrent que plus la bande fleurie est de qualité, plus les chances de contrôler efficacement les pucerons sont grandes. Cela semble assez trivial, mais c’est un point important à démontrer. Une bande fleurie de qualité comportera des espèces à floraison précoce et le couvert floristique sera assez diversifié pour profiter à un vaste ensemble d’ennemis naturels, car toutes les espèces d’auxiliaires n’apprécient pas les mêmes plantes. C’est sur ce point en particulier qu’il convient de travailler en amont pour optimiser les chances de réussite de la seconde phase d’échantillonnage du projet IAE-Betteraves, prévue à partir d’avril 2023.

 

 

Figure 3 : Un exemple de bande fleurie dans un champ de betterave pour laquelle seule la phacélie est en fleur, à une période critique du développement de la culture quant à son risque d’exposition aux pucerons virulifères. (Photo : Kévin Tougeron, mai 2022).

 

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